Les deux jeunes hommes sont accusés d’avoir volé le téléphone portable d’un adolescent. Malgré les nombreuses preuves à leur encontre, ils continuent de nier les faits devant le tribunal.
Suraj, un jeune homme de 17 ans, se promenait dans une rue de Deuil-la-Barre quand il a été approché par Rahim et Abdoulaye, deux hommes de 22 ans. Ils lui ont demandé son téléphone afin de « joindre un ami ». Suraj a pressenti l’arnaque et a prétendu que son téléphone était déchargé. C’est alors qu’Abdoulaye a sorti un cutter et que Rahim a exigé son téléphone. Suraj a finalement remis son iPhone 13 à Rahim.
Peu de temps après l’incident, Suraj s’est rendu au commissariat d’Enghien-les-Bains pour déposer une plainte. Les forces de l’ordre ont activé la localisation de l’iPhone, qui se dirigeait tranquillement vers Saint-Denis. Ils ont alors décidé de poursuivre le signal.
Une fois arrivés à l’endroit où se trouvait le téléphone, les policiers et Suraj ont aperçu deux hommes correspondant parfaitement à la description donnée par Suraj : l’un était mince, l’autre de corpulence plus imposante. À la vue des policiers, le plus mince a semblé dissimuler un objet sous la voiture d’où ils venaient de sortir. Ils ont alors été arrêtés.
Identification et géolocalisation
Dans la poche d’Abdoulaye, l’homme plus corpulent, les policiers ont trouvé les clés de la voiture. À l’intérieur de celle-ci, ils ont découvert un cutter que Suraj a reconnu. Sous la voiture, ils ont retrouvé le téléphone de Suraj. Selon la victime, seul Rahim, l’homme plus mince, lui avait parlé. C’est lui qui lui avait volé son téléphone et forcé à révéler son code de déverrouillage.
Deux jours plus tard, Rahim et Abdoulaye comparaissaient devant le tribunal de Pontoise. À la question de la présidente du tribunal : « Qu’avez-vous à dire aujourd’hui ? », Abdoulaye a répondu : « Je n’ai pas commis ces actes. » Rahim a simplement déclaré : « Je suis innocent. » La présidente leur a rappelé qu’ils avaient été identifiés, que la géolocalisation du téléphone de la victime les avait suivis de Deuil-la-Barre à Saint-Denis et que le cutter avait été trouvé dans leur voiture.
« Un troisième individu »
L’un des deux hommes a affirmé qu’ils étaient simplement de passage à Deuil-la-Barre en route pour Saint-Denis. Ils ont ajouté qu’un « troisième individu » était avec eux, mais qu’ils l’avaient déposé peu avant d’arriver à Saint-Denis. Face à ces déclarations, la présidente du tribunal était sceptique.
« Pourquoi la victime vous a-t-elle identifiés tous les deux et n’a-t-elle pas mentionné ce troisième individu ? »
Abdoulaye a rétorqué : « Je ne comprends pas, je n’ai jamais de cutter sur moi ».
La présidente a ensuite demandé : « Pourquoi vous êtes-vous baissé ? »
Rahim a répondu : « J’ai vu des voitures de police s’approcher et j’ai voulu me cacher ».
« Mais pourquoi, si vous n’avez rien fait ? »
Rahim a alors déclaré, résigné : « Parce que de nos jours, même si on est innocent, c’est le passé judiciaire qui parle ».
La procureure a ensuite interrogé les prévenus : « Comment se fait-il que le téléphone ait été retrouvé avec vous, alors que soi-disant, un troisième individu aurait commis le vol ? »
Elle a ajouté : « Ce troisième individu. Il n’apparaît nulle part sauf dans vos déclarations. Pourquoi la victime vous aurait-elle décrits tous les deux et n’aurait-elle pas mentionné une troisième personne ? »
L’un des prévenus a répondu avec assurance : « Je me pose les mêmes questions, madame ». Après un court silence, les deux hommes ont posé plusieurs questions, comme s’ils essayaient aussi de résoudre un mystère. Abdoulaye a finalement conclu : « Vraiment, moi, je ne comprends pas ».
« Est-ce un enfant conçu en prison ? »
La présidente a ensuite examiné leur casier judiciaire. Celui d’Abdoulaye était vierge, tandis que celui de Rahim comportait neuf mentions, dont plusieurs pour extorsion avec violence. « Vous avez fait l’objet de trois sursis probatoires, tous révoqués. Les derniers faits remontent à 2020. Pendant trois ans, aucune infraction. Comment expliquez-vous votre bonne conduite ? Oh, attendez ! Vous nous avez caché quelque chose. Le 25 mars 2022…
Rahim a interrompu : « Oui, j’ai été condamné en 2022 ».
La présidente a continué : « Pour… extorsion avec violence…
Rahim a confirmé : « Oui, mais je n’étais pas seul ».
La présidente a ajouté : « …à quinze mois de prison avec mandat de dépôt, tout de même. »
Rahim, qui travaille actuellement comme préparateur de commande, a été libéré en mars 2023. À la question de la présidente sur sa situation actuelle, il a répondu : « Eh bien, je vais devenir père dans un mois ».
« C’est votre enfant ? »
Rahim a répondu : « Euh, oui, bien sûr ».
« Est-ce un enfant conçu en prison ? »
Rahim a semblé confus : « Pardon ? »
La présidente a précisé : « Eh bien, vous avez été libéré en mars ».
Rahim a répondu : « Ah oui, je comprends ce que vous voulez dire, mais pourquoi me posez-vous ces questions ? »
La présidente a expliqué : « Eh bien, c’est pour mieux vous connaître. »
« Et si ces deux jeunes disaient la vérité ? »
La procureure a été sans pitié. Elle a jugé leur version des faits « fantaisiste » et a requis douze mois de prison avec sursis pour Abdoulaye et dix-huit mois de prison ferme pour Rahim.
Leur avocat a plaidé la relaxe, posant des questions pour semer le doute dans l’esprit des juges : « Et si ces deux jeunes disaient la vérité ? Pourquoi auraient-ils sorti un cutter ? Et pourquoi n’y aurait-il pas de troisième personne ? »
Après une suspension de séance, la décision a été rendue : huit mois avec sursis pour Abdoulaye, neuf mois de prison ferme avec mandat de dépôt pour Rahim. À l’annonce du verdict, Rahim, surpris, a lancé à la présidente : « Eh, la peine est passée de dix-huit mois à neuf ? C’est clair.
La présidente a semblé surprise : « Hein ? »
Rahim a ajouté : « C’est bien ! »
La présidente a conclu : « Eh bien, l’essentiel, c’est que vous soyez satisfait. »
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